Pour une prévention efficace du harcèlement sexuel au travail

Publié par Cathrine Mathey le

De bonnes relations au travail sont essentielles pour se sentir bien sur son lieu de travail et également pour atteindre les résultats attendus. L’ensemble du personnel doit pouvoir être connu et reconnu pour ses compétences et ses qualités. De telles relations peuvent se développer dans des environnements de travail inclusifs, qui ne laissent personne de côté. Or, une personne sur trois a observé sur son lieu de travail un type de comportement potentiellement importun[1]. Il s’agit le plus souvent de commentaires ou plaisanteries désobligeants ou obscènes, d’images pornographiques, de gestes obscènes ou du fait de se faire siffler ou déshabiller du regard. Les femmes ont un risque plus élevé que les hommes (entre deux et dix fois plus selon les études[2]) d’être victimes de tels comportements au travail, appelés également agissements sexistes ou harcèlement sexuel. Un tiers des apprenti.e.s doit également composer avec de tels agissements[3]sur leur lieu de travail. Ces faits sont non seulement inacceptables mais également interdits par la loi. Dès lors, favoriser un climat de travail bienveillant, savoir repérer les comportements inopportuns et finalement savoir réagir efficacement lors de signalements par des victimes ou des témoins sont trois éléments clés pour prévenir puis traiter le harcèlement sexuel au travail.

En premier lieu, il faut agir en amont des difficultés. Il n’y a pas de harcèlement sexuel au travail dans votre entreprise ni de comportements inopportuns et déplacés ? L’ambiance est légère et respectueuse de chacun ? Tant mieux, mais vous devez agir pour permettre le statu quo et prévenir d’éventuelles difficultés. En effet, en tant qu’employeurs, vous êtes tenus par la loi sur l’égalité  (LEg) de prévenir le harcèlement sur le lieu de travail. Dès lors, vous pouvez prendre un pas de recul et réfléchir à ce qui fait l’alchimie d’une bonne équipe, et d’un lieu de travail stimulant et agréable tant pour les femmes que pour les hommes. La psychologie du travail vous renseigne par des modèles et des théories éprouvées à ce sujet. En résumé, les ingrédients principaux tournent autour de la qualité des relations au travail et d’une organisation des tâches qui fasse du sens pour les collaborateurs.trices. Il faut dans la mesure du possible favoriser un travail varié pour lesquelles les collaborateurs.trices peuvent s’impliquer, prendre des décisions, interagir avec autrui. Pensez également à offrir des espaces de discussion tant sur les tâches que sur les relations et si possible intégrez leurs remarques. En matière d’ambiance de travail, la direction a tout intérêt à défendre un humour qui ne se fasse pas sur le dos d’une tierce personne ou d’une autre catégorie de personnes.

En deuxième ressort, il est utile de préciser ce que recouvre la notion de harcèlement sexuel au travail. Dans ce domaine, les perceptions et les représentations personnelles sont bien diverses. Dans le cours que je propose sur ce thème avec une collègue de travail, les discussions sont souvent animées. Que peut-on dire ou encore faire ? Est-ce que je dois accepter que mon chef m’appelle « ma petite » ? Est-ce que l’on peut évoquer à demi-mots des enfants en bas âge pour refuser ou temporiser la promotion d’une collaboratrice ? Est-ce que je peux faire encore des blagues sur les blondes ? C’est une discussion quasi culturelle qui émerge souvent dans nos cours, avec les représentations, les normes et les valeurs de chacune et chacun, empreintes de notre éducation, de notre parcours et de notre position sociale.

Finalement et non des moindres, l’entreprise doit se préparer à faire face à l’éventualité d’un signalement ou d’un malaise relatif à ce thème. Il faut prévoir des processus pour que les employé.e.s touché.e.s sachent comment en parler, et obtenir de l’aide. A ce titre, la jurisprudence fédérale préconise deux niveaux. Il faut d’une part proposer un dispositif confidentiel par le biais de personnes de confiance qui offrent aux collaborateurs.trices la possibilité de s’informer, de s’exprimer sur ce qu’ils vivent, de recevoir des conseils et une aide concrète au besoin. La confidentialité est ici assurée et ceci a son importance, tant on sait que les collaborateurs.trices qui subissent du harcèlement sexuel se gênent d’en parler et hésitent longtemps avant de le faire. Lorsqu’ils le font, ils.elles seraient souvent exposé.e.s au mobbing par d’autres membres du personnel[4]. C’est pourquoi il est essentiel de proposer un dispositif qui permette de recevoir des conseils dans un cadre sécurisé. D’autre part, il faut que les cadres et les RH soient en mesure de détecter les situations potentiellement néfastes dans ce domaine et sachent réagir adéquatement. Ils doivent être au courant des comportements constitutifs de harcèlement sexuel au travail et parfois ils doivent au préalable s’être remis en question sur leurs propres préjugés et croyances en la matière. Si un.e collaborateur.trice vient se confier auprès d’eux de harcèlement sexuel au travail, ils doivent savoir comment réagir et quel niveau de confidentialité ils peuvent appliquer. Ils doivent prendre au sérieux tous signalements et ne pas les banaliser. Ce positionnement demande du tact et de la précision. Nous exerçons ces compétences dans la formation que nous donnons.

En résumé, les entreprises se doivent de prendre à bras le corps la thématique des atteintes à l’intégrité physique et psychique. Dans une période de pénurie de personnel qualifié, elles ont tout intérêt à proposer un environnement de travail sain et qui exclut ces atteintes afin de fidéliser leurs collaborateurs.trices et se positionner comme un employeur irréprochable. C’est ainsi qu’elles s’assureront d’offrir à leurs collaborateurs.trices un environnement de travail stimulant et attractif. Si vous êtes intéressé.e à mettre sur pied une telle formation au sein de votre entreprise sise en Valais, vous pouvez être soutenu.e financièrement par l’Office cantonal de l’égalité et de la famille (OCEF) du Valais sous réserve du budget disponible.

Expertise RH, Cathrine Mathey, mai 2023


[1] Etude du BFEG et du SECO sur le risque et l’ampleur du harcèlement sexuel sur le lieu de travail, 2008. Il existe également à ce sujet un rapport du Conseil fédéral en 2022, il concerne toutefois principalement le harcèlement sexuel en général et non pas le harcèlement sexuel au travail qui nous intéresse ici.

[2] Harcèlement sexuel en Suisse : ampleur et évolution, rapport du Conseil fédéral en 2022.

[3]Etude d’Unia en 2019 auprès d’apprentis.

[4] Harcèlement sexuel en Suisse : ampleur et évolution, rapport du Conseil fédéral en 2022.

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