Le management transversal : la conduite sans le statut

Publié par Cathrine Mathey le

La société a tendance à valoriser les postes de manager ; on leur confère un salaire plus élevé, une considération sociale plus haute, on attend d’eux un engagement en temps et en énergie de minimum 100% si ce n’est plus. Et c’est vrai, le management est un art qui confine souvent au pilotage en haute mer. Il s’agit non seulement de maîtriser ou de comprendre un domaine technique quel qu’il soit mais également d’observer le comportement humain et d’agir sur les relations humaines.

Lorsque le travail du management est bien fait, il est difficile de constater précisément de l’extérieur ce qui est réellement fait. C’est plus souvent lorsque le manager ne fait pas son travail, que l’on remarque les conséquences de cette inaction : manque de coordination dans l’équipe, démotivation, absences, perte financière… De la même manière, la nécessité du travail ménager se remarque dans sa négation : poussière qui traîne et crasse qui s’incruste. Alors qu’ils ne possèdent pas du tout le même statut social et il est vrai ne poursuivent pas la même finalité, le travail du manager et le travail ménager se ressemblent sur un point (et pas seulement dans les mots) : ils sont souvent constitués de tâches infimes, répétitives. A part les quelques coups d’éclat tel l’entretien annuel qui consacre le manager dans son rôle et les à-fonds du nettoyage printanier pour le travail ménager, le travail essentiel de ces deux métiers est constitué de petits signaux ou gestes tels qu’approbation non verbale, écoute active, valorisation des efforts accomplis pour le manager, ramassage de chaussettes qui traînent ou nettoyage de petites traces sur les fenêtres pour ce qui est du ménager. Les deux s’attèlent à créer un environnement dans lequel on se sente bien.

Mais revenons aux managers. Dans l’ensemble de ces derniers, il y en a qui le sont sans être reconnus formellement par l’entreprise. On les appelle chef-fe de projet, responsable de fonction de support (état-major) ou de processus (finances, communication, marketing, ressources humaines, management de la qualité et contrôle interne). Ils jouent un rôle central dans les entreprises en ce sens qu’ils fonctionnent au travers des départements ou services et évitent les logiques éventuelles de cloisonnement liées à l’organisation en silo. De par leur constitution à durée déterminée et /ou flexible, ils réagissent de manière plus rapide et réactive aux demandes du marché ou de l’entreprise. Le terme de management transversal a été proposé en français tandis que les alémaniques nomment ce phénomène « laterale Führung ». Pour l’instant, ce terme se retrouve peu dans les organigrammes officiels des entreprises. Pour autant, ces personnes remplissent des tâches de management qui comportent quelques particularités.

Ainsi, le manager transversal ne peut pas compter d’emblée sur une légitimité conférée par la fonction, il s’agit donc pour lui d’autant plus de la construire. Son enjeu réside dans la recherche de l’influence sans avoir recours au lien hiérarchique. Il doit miser sur la dimension relationnelle et une analyse stratégique de son environnement. Il s’attachera particulièrement à examiner les relations de pouvoir à l’intérieur de l’organisation, les marges de liberté et les contraintes qui pèsent sur les différents acteurs. Il doit ainsi adopter une position d’observation et d’humilité. Il sollicite toutefois clairement des compétences de stratège en décodant son environnement, en gardant le cap sur son objectif et en mobilisant les acteurs clés pour la réussite de ses projets. Si le management transversal manque de reconnaissance dans l’entreprise, c’est également à la Direction de s’en apercevoir et de le favoriser en lui confiant des projets stratégiques.

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